Alors que le monde scientifique peine à laisser une place aux femmes afin d’atteindre une parité plus que nécessaire, ’Women of Science’ vous offre une plongée au coeur du problème, à travers le portrait de femmes scientifiques. Ces dernières ont accepté de se confier sur leur parcours et la réalité de la question du genre dans leur domaine, pour participer à la création de cette collection de vies et d’histoires.
« Quand j’étais lycéenne, je voulais faire médecine. Mais mon père avait ce stéréotype des filles qui ne font pas d’études. Il ne m’a jamais poussé, il m’a dit que je serais incapable de faire des études et qu’il ne me les payerait jamais. Cela m’a tellement découragé que je ne me suis jamais inscrite en fac de médecine. Par contre, je me suis inscrite en secret en fac de biologie. Je me suis financée toute seule mes études. Ça m’a donné la niaque. Je pense que je suis allée jusqu’au doctorat pour prouver à mon père que j’étais capable de faire des études, car chaque année, il continuait à me questionner sur mon “plan B”, en affirmant que jamais je ne passerais l’année. »
« Lorsque j’occupais mon ancien poste, j’avais un responsable complètement misogyne et pervers narcissique. Régulièrement, des femmes de mon équipe venaient me voir en pleurant. Il les descendait moralement avec une pression psychologique très importante. J’ai fini par le dénoncer à l’inspection du travail : il y a eu une enquête qui montrait qu’il y avait 15 personnes en souffrance. Pourtant, ma société a préféré privilégier le côté financier, et a gardé cet homme dont ils connaissaient le caractère. Il y avait trop d’argent en jeu pour s’affranchir de lui. Quant à cet homme, il a très mal vécu d’avoir été dénoncé, mais surtout dénoncé par une femme. Je suis alors partie. À cette même période, une collègue femme qui s’occupait d’une équipe de 5 personnes avait également quitté la société. Elle a été remplacée par un homme. Cet homme avait un diplôme d’ingénieur et était plus jeune que moi. Il avait une équipe de 5 personnes. Avant mon départ, j’en avais une de 12. Et pourtant il était mieux payé que moi. »
« Je voulais faire des sciences parce que je pensais que c’est un domaine où on reconnaît la valeur de ton travail à la présence de résultats, et donc au mérite. Mais finalement c’est pareil que dans les autres milieux, ça marche mieux pour certains. Et donc quand tu es une fille, ce n’est pas pareil. Mais je suis convaincue que ça commence à se débloquer, que c’est en train de changer, il y de plus en plus de femmes à des postes plus élevés. Ça va prendre du temps. Ça va nous demander plus d’énergie d’avoir les postes qui sont plus accessibles aux hommes. Il y aura toujours des collègues très sûrs d’eux, qui se placeront au dessus. Mais ils finiront par se rendre compte que si nous nous mettons en avant c’est parce que nous sommes à 300% sûres de ce qu’on affirme. Puis les femmes seront plus à l’écoute de candidates féminines, et ça évoluera. Une femme saura qu’on peut y arriver en ayant une vie de famille à côté, que c’est possible, ce que les hommes ne comprennent pas forcément. »
Karine a obtenu un doctorat en biologie moléculaire avec félicitations du jury, et a ensuite passé un diplôme complémentaire en statistiques ainsi qu’un certificat inter-universitaire d’Attaché de Recherche Clinique, D’abord dans la recherche en biologie moléculaire et cellulaire, elle est aujourd’hui data manager, et gère des données d’essais cliniques. Gestionnaire de projet pour un prestataire de services, elle effectue des missions à temps plein pour diverses entreprises. Elle est aussi mère de trois enfants.
COMMENTAIRES