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Etre Open Access dans le monde de la recherche scientifique

La quantité de connaissances disponibles aujourd’hui dans n’importe quel domaine scientifique a littéralement explosée, conjointement liée à l’accroissement démographique et à l’augmentation du niveau d’éducation moyen mondial qui fait croitre exponentiellement le nombre de chercheurs qui cherchent et de chercheurs qui trouvent.

État des lieux – un chercheur sachant chercher mais surtout publier !

La quantité de connaissances disponibles aujourd’hui dans n’importe quel domaine scientifique a littéralement explosée, conjointement liée à l’accroissement démographique et à l’augmentation du niveau d’éducation moyen mondial qui fait croître exponentiellement le nombre de chercheurs qui cherchent et de chercheurs qui trouvent¹. En France, nous conservons notre 8ème rang mondial en termes de nombre de chercheurs, au-dessus de la moyenne européenne d’après l’OCDE (Organisation for European Economic Co-operation)². Pour ces chercheurs qui écrivent des articles scientifiques afin présenter le résultat d’un travail original ou les principales conclusions d’une thèse, la publication scientifique permet de largement diffuser leurs travaux et de se faire (re)connaître au sein de leur communauté en suscitant un échange. La publication est devenue si importante pour un chercheur qu’elle fait partie des critères d’évaluation de leur performance (le fameux H factor).

Les articles scientifiques sont publiés dans des revues spécialisées dont la particularité réside dans deux aspects : les comités de lecture et le coût faramineux de leur abonnement ! Les comités de lecture contrôlent la qualité scientifique des publications en vérifiant la rigueur des résultats et des conclusions afférentes, ce qui permet d’éviter les comportements non conformes à l’éthique scientifique. Mais c’est bien évidemment le second point qui est le plus problématique et la communauté scientifique tente, depuis l’apparition du digital et des réseaux numériques, de se défaire de ces éditeurs qui cherchent à maximiser leurs profits en dépit d’une amélioration de la qualité. Par exemple, le résultat net d’Elsevier en 2017 (leader dans ce domaine) était de 2,6 milliards €, en hausse de 6%³. L’Union Européenne a donc décidé d’agir et de construire un cadre pérenne afin d’aider les échanges entre chercheurs.

 

L’OA – Un planche qui fait trembler les revues scientifiques !

Le nouveau cadrage de l’Union Européenne s’appelle « Plan S »4, une initiative de la Commission européenne et de « cOAlition S » (regroupement de 11 organismes nationaux de financement dont l’Agence Nationale de la Recherche) lancée le 4 septembre 2018, qui prévoit d’exiger que d’ici à janvier 2020, tous les résultats de recherche financés par l’argent du contribuable soient publiés dans des journaux scientifiques en libre accès pour les lecteurs, alors que la plupart aujourd’hui sont uniquement accessibles après la souscription d’un abonnement. Ce sera alors aux auteurs d’articles scientifiques de s’acquitter des frais de publication mais ils pourront conserver leurs droits d’auteurs5. Nos publications seront alors accessibles gratuitement, facilement et immédiatement pour tou.te.s, en France et ailleurs, et ceci dès le 1er janvier 2020 (Science Europe 2018).

Militer pour un Mode du « Free for all » et de la Co-Construction

Quand un chercheur où qu’il soit dans le monde est limité financièrement dans sa capacité à publier ou à consulter des articles scientifiques, il perd en efficacité, au détriment du savoir collectif et de toute la communauté. À quand donc la fin des restrictions pour la publication ou la consultation d’articles scientifiques ? La première réponse est l’Open Access. Le vrai, pas juste des techniques et des moyens d’Open Access récupérés par des circuits qui protègent un système ancien. « Je ne publierai plus jamais dans des revues scientifiques qui ne me permettent pas de mettre simultanément en libre accès le résultat de ma recherche. Et j’espère sincèrement que nous serons de plus en plus nombreux à le faire », le discours tenu par O.Ertzscheid6, enseignant-chercheur et blogueur renommé, explique pourquoi le système des revues scientifiques, depuis l’évaluation par les pairs jusqu’aux abonnements exorbitants, va à l’encontre du travail scientifique et de sa diffusion au plus grand nombre. Un autre exemple parlant aux chercheurs est Alexandra Elbakyan, la créatrice de Sci-Hub7 qui est tout simplement à l’heure actuelle la plus grosse bibliothèque scientifique clandestine du Web, plus de 50 millions d’articles, et dont la controverse qu’il suscite ne va pas assez loin.

Alors, bien sûr Elsevier lui colle un procès, bien sûr diverses manipulations plus ou moins légales tentent de faire disparaître ce site, mais un vrai système mondial fondé sur l’Open Access où chacun publie légalement et consulte à coût dérisoire et sans limite de capacité est nécessaire et non négociable pour avancer vers une Science ouverte et pérenne car nous avons largement exploré les solutions « simples » de la science, appelées principes fondamentaux. Les nouveaux progrès proviennent et proviendront de plus en plus de mélange de connaissances dans des domaines complémentaires : les chimistes, physicien.ne.s, biologistes, médecins, électronicien.ne.s, informaticien.ne.s et bien d’autres doivent travailler ensemble pour construire les nouvelles inventions et innovations de demain.

Des Limites ? mais aussi des Opportunités

Oui, l’Open Access a ses limites : peur d’un manque de pertinence, d’exhaustivité ou de qualité dont les chercheurs ont besoin mais le modèle de publication traditionnel semble bien atteindre ses limites. La pression sur les chercheurs mais aussi sur les revues va continuer à augmenter parallèlement à l’augmentation du nombre de connaissances à publier, avec des conséquences néfastes sur la qualité des processus de relecture, les délais de publication, la disponibilité des connaissances, et pour finir, sur la qualité des articles scientifiques publiés par les chercheurs.

La technologie évolue constamment et est une véritable opportunité pour le développement de l’Open Access. De nouveaux développements, tels qu’OpenStack, Progressive Web Apps, Rust, R, le cloud cognitif, l’intelligence artificielle (IA) et bien d’autres encore, rebattent les cartes de nos paradigmes habituels. L’Open Source en Sciences bénéficie aussi de ces avancées et permet de proposer de nouveaux modèles comme PubPeer avec des processus de relecture collaborative (Open Peer Review)8, ou GinGo, une startup française, qui fait appel à l’Intelligence Artificielle pour qualifier les articles scientifiques9. Son CEO, Jonathan Baptista, assure d’ailleurs : « à l’heure du big data, l’Open Access en Science n’est pas une utopie, c’est le chemin logique d’une Science en avance sur son temps ».

 

 

Rédactrice : Angela HIN (@angela_hin)
E-mail : angela.w.hin@gmail.com

 

Sources :

1.      “UNESCO Science Report : towards 2030”, Publié en 2015 par l’UNESCO (United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization) et mis à jour en 2016

2.      L’état de l’emploi scientifique en France-Édition 2018

3.      Antoine Oury, « Un chiffre d’affaires de 8,3 milliards € pour RELX (Elsevier) en 2017 », Publié le 16 février 2018

4.      Site officiel ‘Plan S’ et ‘cOAlition S’

5.      Collectif, Publications scientifiques : les pièges du « Plan S », Publié le 09 octobre 2018

6.      Olivier Ertzscheid, « Je ne publierai plus jamais dans une revue scientifique », Publié le 19 mai 2016

7.      Pierre-Carl Langlais « Sci-Hub : la première bibliothèque scientifique mondiale ? Un site pirate », Publié le 15 février 2016

8.      PubPeer – Search publications and join the conversation

9.      GinGo Research, plateforme Open Source d’articles de recherche tous domaines confondus.

*** A Lire aussi Richard Monvoisin, « Recherche publique, revues privées », Le Monde diplomatique, décembre 2012.

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