Nous pourrions chercher un moyen de l’écrire, mais ce n’est pas nécessaire. Vous savez tous à quoi ressemble le croassement d’un corbeau ou d’une corneille. Il glace le sang, on l’associe à la mort ou à un lieu terrifiant… Mais savez-vous qu’au-delà de la sale réputation qu’ils se traînent, les corvidés sont de petits génies ?
Les plus fortiches ce sont d’ailleurs les corbeaux. À tel point que certains biologistes les surnomment même « primates à plumes », et l’on considère que ce sont les oiseaux les plus intelligents. Comme certains singes, ils sont en effet capables d’utiliser des outils fabriqués par leurs soins. Jolyon Troscianko et ses collègues ont par exemple observé certains de ces oiseaux détacher une petite branche, lui retirer toutes ses feuilles, avant de s’en servir pour capturer des asticots bien cachés dans un arbre.
Et n’allez pas croire qu’il s’agissait de cas isolés. Selon les estimations des scientifiques britanniques, les corbeaux utiliseraient des outils pour se nourrir dans presque 20 % des cas !
Regarder, apprendre et appliquer
L’intelligence des corbeaux leur permet donc d’apprendre, et de retenir une information vitale. Un exemple bien connu est celui de la « coopération » entre les loups et les corbeaux du parc Yellowstone. Les oiseaux ne se nourrissent sur des carcasses à la seule condition que des loups soient également présents ! Pourquoi ? Les chercheurs ont nommé cela « néophobie » : les corbeaux ont retenu que la viande était fraiche, donc qu’ils ne risquaient pas de s’empoisonner, lorsque la proie venait d’être tuée par les loups. Aussi, les corvidés ont maintenant « peur » des sources de nourriture où leurs compagnons canins ne sont pas présents.
Plus étonnant encore, toujours à Yellowstone, il arrive que les corbeaux aident les loups dans leur recherche de proie. On a ainsi observé les oiseaux venir voler tout près des prédateurs pour les exciter, puis finalement les « guider » jusqu’à un wapiti isolé de son troupeau. Dans ce genre de cas, il est difficile de conclure avec certitude que les corbeaux savent utiliser les compétences de chasse des loups à leur avantage. Mais cela y ressemble beaucoup !
Enfin, une étude récente du rapport des corbeaux à la mort a montré qu’ils tiraient des leçons de la perte d’une des leurs. Kaeli Swift de l’université de Washington souhaitait savoir comment ils réagissaient face à la dépouille d’un autre corbeau, et elle a demandé à des personnes de se tenir prêt d’une mangeoire avec le cadavre. Les oiseaux se réunissaient alors aux alentours et émettaient des croassements spécifiques. Ensuite, aucun d’eux ne s’approchait de la mangeoire tant que le meurtrier potentiel était présent. Les corbeaux ont donc été capables de faire le lien entre le cadavre et l’humain, pour en déduire qu’il représentait peut-être une menace.
Bientôt des corbeaux en CP ?
Vous me direz : « reconnaître un danger c’est pas si dur, mon chat a bien compris que l’aspirateur était son ennemi mortel ». Mais sait-il compter ? Parce que les corbeaux, oui. De nombreuses expériences ont déjà montré que ces oiseaux savent par exemple différencier des images en fonction du nombre de points dessinés sur elles, et de choisir la bonne donnant accès à une récompense. Indépendamment de la forme ou de la couleur des points. D’ailleurs, en observant directement l’activité de leurs neurones, Helen Ditz et son équipe ont conclu qu’ils possédaient des groupes de cellules associés à différents nombres. En leur montrant une forme marquée de trois points, le neurone « trois » s’activait.
Cette capacité à compter est associée à une facilité étonnante qu’ont les corbeaux pour résoudre des problèmes parfois complexes. Ils peuvent faire des liens de causalité, type « si je fais ça, alors il va se passer ça. ». Selon Sarah Jelbert de l’université d’Auckland, l’intelligence des corbeaux pourrait être comparée à celle d’un enfant de 5-7 ans ! Prêts à rentrer au CP quoi.
Et dire que pendant que l’on perdait notre temps à apprendre à lire, les corbeaux apprenaient à voler… Je sais pas vous, mais moi je viens de décider en quoi je voulais me réincarner maintenant.
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